Par: Pierre Nguyen

On le sait tous, la poursuite pour l’obtention d’un brevet peut s’avérer coûteuse. Par exemple, pour un dossier américain, une seconde lettre officielle sur les mérites d’un dossier (i.e., excluant les réponses pour manque d’unité, « restriction requirement ») est très souvent finale. Et afin que de nouveaux arguments soit considérés en réponse à une lettre officielle dite finale, un « request for continued examination » (RCE pour les intimes), doit être déposé. Or, le RCE doit être accompagné d’un taxe de $930 (ou la moité pour une petite entité). Quand la poursuite est longue, il peut y avoir la nécessité de déposer plusieurs de ces RCE. Sans compter les services de l’agent de brevets, évidemment.

Justement, dans un de ces dossiers où la poursuite est longue, j’ai récemment reçu un appel de l’examinatrice, qui me proposait de modifier les revendications pour les rendre allouables. Comme la technologie était toute simple, je n’avais pas crû bon d’avoir une entrevue durant l’examen. En l’écoutant raconter la portée des revendications qu’elle trouvait justifiée, je me suis permis de faire un sommaire de l’innovation revendiquée. Et c’est alors qu’elle a lâché quelques phrases auto-explicatives:

« Now I understand »
« This is not what I had examined the claims on »
« This changes my position »

Malgré la simplicité de la technologie, Madame était complètement dans le champ. Je me suis donc permis de passer le message. Le message était quelque chose comme:

« $%?&*. Prosecution has been dragging. This case has gone to pre-appeal and the board indicated you were wrong, and returned the case back to you for further examination. Now I learn that you did not understand the technology up to now? I think I will take this to your primary examiner [NDLR: son superviseur] to discuss and have a fair review ».

Il va sans dire que ce type de pression peut faire bouger les choses. 3 appels de l’examinatrice un peu paniquée ont suivi (« je dois y penser », « je vais en parler pour vérification »), et hop, le dossier avance.

Les entrevues ont de nombreux bénéfices. Elles laissent moins de trace que sur papier, permettent de lever le ton (ou, inversément, de flatter), d’entendre ou voir la réaction de son interlocuteur, etc. Bien souvent, les entrevues permettent de réduire la durée de l’examen, d’avoir un brevet de portée plus juste. C’est pourquoi des programmes ont été mis en place pour faciliter les échanges verbaux, dont le programme pilote « first-action interview program » du USPTO, qui débute l’examen par une entrevue entre examinateur et demandeur.

Entrevues avec des Examinateurs de brevet: pourquoi s’en passer?