Lundi, une cour d’appel américaine a tranché : un singe ne peut pas intenter de poursuite pour la contrefaçon de ses selfies en vertu de la loi américaine sur le droit d’auteur.

Rappel des événements : en 2011, le photographe David Slater est en Indonésie afin de réaliser un reportage sur les macaques. Alors qu’il s’éloigne de son trépied, un des singes s’empare de son appareil et prend une centaine de photos de lui-même, dont trois autoportraits très réussis. Les photos font rapidement le tour du monde et sont publiées dans un livre de Slater.

Trois ans plus tard, la fondation Wikimedia ajoute les images à sa banque de fichiers libres de droits. Slater exige que la photo soit retirée du site, ce que Wikimedia refuse, estimant qu’une photo prise par un animal fait partie du domaine public. Le Bureau américain du droit d’auteur modifie ensuite ses directives (voir §306 et §313.2) afin de préciser que désormais, seules les œuvres créées par des humains pourront être enregistrées. Débute alors la bataille judiciaire, alors qu’en 2015, l’association People for the Ethical Treatment of Animals (PETA) demande à une cour américaine de reconnaître que le singe nommé Naruto est l’auteur et le propriétaire des droits des photos. La cour rejette l’action de PETA, qui porte l’affaire en appel.

PETA et Naruto remportent tout de même une petite victoire en 2017, alors que Slater et sa compagnie s’engagent à verser 25 % des revenus futurs liés à l’utilisation et la vente des photos du singe à des organismes assurant la protection de l’habitat des macaques en Indonésie.

Et voilà que lundi, la cour d’appel confirme que Naruto — et plus largement tout animal autre qu’un être humain — n’a pas la qualité pour agir en vertu de la loi américaine sur le droit d’auteur.

Malgré son caractère surréaliste, l’affaire inspire quelques réflexions sur le droit d’auteur. Si un animal peut créer une œuvre sans pouvoir faire valoir des droits de propriété intellectuelle, comment traitera-t-on des œuvres créées entièrement par une intelligence artificielle? Comment interpréter le critère d’originalité ou le statut d’auteur lorsque l’apport d’un humain dans la création d’une œuvre est très limité ou très indirect? Voilà peut-être des questions que devront étudier nos législateurs et tribunaux.

Chose certaine, le droit d’auteur est constamment confronté à ses limites, et est certainement voué à l’évolution.