Décidément, le ministre Leitao croit en l’innovation. Après le programme Premier brevet, voici maintenant le crédit d’impôt pour revenus provenant de brevets. De quoi stimuler l’innovation… peut-être?

Pour illustrer mon enthousiasme mitigé, permettez-moi une anecdote. Je me souviens qu’à mes débuts dans la profession, il y avait un programme finançant l’octroi d’un brevet, un peu comme le programme Premier brevet.  Comme j’étais nouveau, j’héritais souvent de la tâche de rencontrer les individus « de la rue », i.e., ceux qui ne sont pas affiliés à une entreprise. Des fois, voire souvent, les inventions me semblaient marginales et je suis poli.  La motivation des individus?  « C’est subventionné par le Programme. »  Et ainsi, des projets directement voués à l’échec ont vu le jour. Bref, sans généraliser parce qu’il y a eu des histoires de succès, le Programme bien intentionné se heurtait à une dure problématique: comment établir les critères pour que l’argent soit attribué aux bons projets.

Revenons au nouveau programme du gouvernement Couillard. Un taux d’imposition plus bas est offert pour les revenus attribués aux brevets.  Si vous lisez les clarifications du lien ci-dessus, vous aurez vraisemblablement la même question que moi: comment distinguer les revenus qui sont attribuables au fait du brevet?  En tous les cas, ça ne devra pas dépasser 50% (?). Vivement les clarifications qui viendront dans les prochains temps.

Par ailleurs, selon mon interprétation, il faudra que le brevet soit octroyé  pour une demande déposée après le budget Leitao, donc après la mi-mars 2016.  Or, obtenir un brevet de bonne portée peut prendre du temps.  Une entreprise bien avisée cherche souvent à se faire allouer des revendications difficilement contournables, et est patiente durant le processus.  En effet, négocier serré avec un examinateur, ça peut ralentir l’octroi du brevet. Ainsi donc, est-ce que l’appât du crédit d’impôt incitera les entreprises québécoises à viser la rapidité aux dépens de la qualité?

Soyons clair, cette initiative du gouvernement provincial est fort bien intentionnée. Comme elle s’applique à des revenus d’entreprises d’une certaine envergure qui commercialisent nécessairement  des produits, l’incitatif ne créera pas de ruée vers des brevets portant sur des technologies futiles.  L’impact réel se jouera toutefois au niveau de la mise en œuvre.