Mon collègue Jérôme Lafrenière vous a récemment parlé de l’arrêt Chouiefaty, cette décision de la Cour fédérale du Canada qui concerne la pratique d’examen de l’Office de la Propriété Intellectuelle du Canada (OPIC) pour déterminer l’admissibilité à la protection par brevet d’une invention mise en œuvre par ordinateur. Le 3 novembre 2020, l’OPIC a émise des directives révisées pour l’examen des brevets tenant compte de l’arrêt Choueifaty. Ces directives comportent de bons points et de moins bons points, que je vous résume ci-dessous.
Les bons points
Toutes références à la « contribution » d’une revendication, à une « solution technique à un problème technologique » et à l’approche « problème et solution » dans la détermination des éléments essentiels pendant l’interprétation téléologique ne devraient plus être employés. Lesdites références dans les chapitres 12, 17, 18, 22 et 23 du RPBB peuvent donc être ignorées.
Dans l’exécution de la détermination des éléments essentiels et non essentiels, tous les éléments établis dans une revendication sont présumés être un élément essentiel, à moins qu’il n’en soit établi autrement ou que ce soit contraire au libellé employé dans la revendication.
Le moyen point
On renforce le critère de l’existence physique, la manifestation d’un effet et un changement physique discernable et qui se rapporte aux réalisations manuelles ou industrielles pour décrire un objet brevetable.
Les mauvais points
Il y a une emphase importante mise sur le paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets (concernant l’exclusion des principes scientifiques ou conceptions théoriques) en ce qui concerne l’objet brevetable. On parle aussi d’une « invention réelle » (en anglais ils disent « actual invention »), qui peut consister soit en un seul élément qui fournit une solution à un problème, soit en une combinaison d’éléments qui coopèrent pour apporter une solution à un problème. À noter que cette expression avait été utilisée dans un avis de pratique de l’OPIC suite à l’arrêt Amazon.com.
On tente encore de trouver des moyens d’écarter certains éléments d’une revendication : « Un élément peut donc être un élément essentiel de la revendication parce que le demandeur a voulu qu’il soit essentiel, même s’il n’a pas d’incidence matérielle sur le fonctionnement de l’invention. Un tel élément ne ferait pas partie de l’invention réelle parce que le fait qu’il n’ait pas d’incidence matérielle sur le fonctionnement de l’invention signifie qu’il ne coopère pas avec d’autres éléments de l’invention revendiquée » (emphase ajoutée).
Conclusions
L’OPIC semble encore vouloir forcer une approche qui cadre avec ses propres intentions et objectifs. L’arrêt Choueifaty nous donne de bons arguments contre un rejet inapproprié d’un examinateur, mais les nouvelles directives ne sont pas de bon augure pour la suite.