Un petit article de type mélimélo pour commencer la semaine afin de partager avec vous certaines informations tirées de mes lectures récentes, lancer des défis à mes collègues et faire un peu d’autopromotion.

1) Article dans Bloomberg Businessweek intitulé « Put Patents Back in Their Place »

Généralement, quand je lis un article dont le titre laisse entendre qu’il faut remettre la propriété intellectuelle à sa place, je suis immanquablement déçu.

Celui-ci cependant est intéressant (notez que le titre de l’article est différent dans la version web).

On y parle du groupe derrière le site Quirky qui se donne pour mission de vendre des « produits inventés par du vrai monde » (ce qui n’est pas sans rappeler un certain slogan politique en vogue). Ces produits peuvent intégrer des inventions protégées par les brevets de GE, cette dernière les rendant disponibles pour des usages qui ne font pas de compétition aux produits de GE. On promet que d’autres entreprises rendront leurs brevets disponibles aux usagers de Quirky sous peu.

Mais pourquoi une entreprise comme GE permettrait-elle cet usage de sa propriété intellectuelle? Comme on explique dans l’article:

GE wants to protect their engine technology so that Rolls-Royce doesn’t copy it, right? But they really don’t care if someone makes a ceiling fan with it.

On peut consulter les inventions brevetées qui sont mises à la disposition des inventeurs de salon ici.

Pour quelqu’un qui pratique en marques de commerce (entre autres choses!), c’est tout à fait logique. La notion de « compétition » est un principe fondamental du droit des marques. Les spécialistes trouveront l’explication rudimentaire et imparfaite, mais en gros, le monopole que la Loi sur les marques accorde au propriétaire d’une marque ne s’étend pas aux produits qui ne font pas compétition aux siens.

Sauf erreur, une telle considération est absente du droit des brevets. Bien sûr, rien n’a jamais empêché une compagnie de moteurs d’avion d’augmenter ses revenus en accordant des licences à des tiers pour des utilisations « non-compétitives » de ses inventions dans des appareils électro-ménagers, mais encore fallait-il trouver un partnenaire pour danser! J’ai l’impression que le droit d’utiliser un brevet pour des fins accessoires n’est pas l’actif le plus liquide qu’il soit. On peut dire, en somme, que Quirky « liquéfie » le marché de l’utilisation non-compétitive des brevets.

Par ailleurs, le système des brevets est souvent présenté comme un « bargain » (littéralement) entre l’État et l’inventeur, l’inventeur divulguant au public son invention (ce qui permet de faire avancer le savoir humain) en contrepartie d’un monopole sur l’exploitation de l’invention divulguée. En plus de son impact « liquéfacteur », Quirky semble donc permettre à l’État d’optimiser le retour sur son investissement dans le cadre de son « bargain » avec l’inventeur puisque celui-ci est incité par des sites comme Quirky à renoncer à une partie de son monopole.

Est-ce une bonne façon d’améliorer ce système qui, à tort ou à raison, subit constamment des critiques? J’aimerais entendre mes collègues là-dessus.

2) Table ronde sur l’emploi du crowdsourcing dans l’examen des brevets

J’ai vu passer sur mon fil Facebook (oui oui, Facebook, ça peut servir à autre chose que de « liker » des photos de Boo), une nouvelle à l’effet que le USPTO tiendra bientôt une table-ronde intitulée « The Use of Crowdsourcing and Third-Party Preissuance Submissions to Identify Relevant Prior Art ».

À l’époque où j’étais membre du comité organisateur de la conférence Legal IT, nous avions organisé un panel sur le « crowdsourcing » du droit. À une époque (pas si lointaine puisqu’on parle de l’édition 2011 de la conférence), il semblait effectivement imminent que certaines sphères du monde de l’information juridique allaient être transformées par le « crowdsourcing » (qu’on peut traduire, laidement, par « approvisionnement par la foule »). Après tout, si les foules peuvent créer une encyclopédie aussi fiable que l’Encyclopédie Britannique (du moins lisait-on en 2005), pourquoi ne pas faire de même pour le savoir juridique?

Quelques années plus tard cependant, outre certaines pages plutôt bien documentées sur Wikipedia au sujet des arrêts clefs du droit américain et certaines décisions annotées sur Rap Genius (je ne blague pas), force est de constater que le crowdsourcing n’est pas très présent dans le monde de l’information juridique.

Le crowdsourcing peut-il cependant faire une percée ailleurs dans le monde juridique en aidant au travail de repérage d’art antérieur dans l’examen des brevets? Encore une fois, que mes collèges pratiquant en droit des brevets se prononcent!

3) Legal IT, c’est lundi prochain!

Parlant de Legal IT, ceci est un rappel que la 7e édition de cette conférence, désormais un classique de la formation juridique, a lieu lundi prochain. Voici le lien vers le programme.

J’y donnerai une présentation en fin de journée portant le titre interminable de L’impression 3D, le « maker movement » et le « matériel libre » (open source hardware) ou comment aider à arrimer le droit à l’univers de Star Trek.

Je vous fais trois promesses:

(1) Il s’agit d’une conférence avancée qui discutera concrètement de l’impact potentiel de la consumérisation des imprimantes 3D sur la PI;

(2) J’oserai me mouiller et ne me contenterai pas de dire « les lois canadiennes ne sont pas adaptées et pourront nécessiter certains ajustements »;

(2) La référence à Star Trek n’est pas qu’une simple histoire de titre accrocheur. Le thème sera respecté à la lettre.

Au plaisir de vous y rencontrer et, d’ici là, prospérité et longue vie!