Vous avez raté l’opportunité de soumettre un dossier de brevets antérieurs en vertu de la nouvelle procédure dont je faisais état dans mon dernier billet ?

L’examen du dossier de brevet qui vous embête est terminé et le brevet est maintenant accordé ?

Tout n’est pas perdu !

Ce n’est pas parce qu’un brevet a été délivré qu’il est nécessairement valide. En fait, les critères de brevetabilité (voir mon article de base sur les brevets au besoin) ne disparaissent pas par magie au moment où le brevet est délivré. La découverte de nouveaux éléments qui peuvent nous porter à croire que le brevet n’aurait pas dû être délivré (ex : l’invention décrite dans la demande de brevet était déjà connue du public avant la date de dépôt) peuvent être allégués en cour pour faire tomber le brevet. Toutefois, se rendre au tribunal aux États-Unis pour débattre la question implique des coûts dont l’ordre de grandeur peut être très dissuasif.

Heureusement, certains mécanismes existent qui permettent d’éviter les tribunaux. D’ailleurs, les changements qui découlent du  « America Invents Act » (AIA), affectent certains des mécanismes qui étaient en place et en prévoient même un tout nouveau. Nous parlons ici du réexamen ex partes, de la révision post-délivrance et de la révision inter partes.

Révision ex partes

Cette procédure permet à une personne intéressée de soumettre au dossier d’une demande de brevet des documents publiés ayant une date antérieure à la date de dépôt de la demande de brevet, ainsi que des commentaires à savoir en quoi tel ou tel document est pertinent face à la validité (nouveauté, inventivité) de l’invention.

La taxe gouvernementale de base est de 17 750 $, ce qui est, croyez-moi, beaucoup moins cher qu’intenter un recours formel aux États-Unis.

Le terme latin ex partes fait référence à une procédure légale mettant en cause une seule partie. Au niveau de cette démarche d’opposition, elle signifie essentiellement que même si le recours peut être intenté par une personne autre que le breveté, l’opposant n’a comme participation que la préparation du recours initial. Après le dépôt du recours, les procédures de révision se font entre le bureau des brevets et le breveté, et l’opposant n’a plus son mot à dire. Par contre, l’opposant peut rester anonyme.

La procédure en entier peut prendre plusieurs années.

Aucune renonciation n’est explicitement prévue par la loi au sujet des documents qui seraient présentés dans la procédure de réexamen ex partes. Néanmoins, plusieurs praticiens considèrent que l’inconvénient principal de ce mécanisme est la renonciation implicite provenant du fait qu’il serait par la suite très gênant de présenter à un juge des arguments qui ont déjà été traités par un examinateur. Ces praticiens considèrent que l’absence de contrôle relié au fait que les opposants ne peuvent avoir plus de participation autre que le dépôt initial des procédures, combiné à l’effet de renonciation implicite qui pourrait survenir alors que la cause est traitée sans leur intervention, confèrent un niveau de risque important à ce mécanisme.

Révision post-délivrance

La révision post-délivrance est un mécanisme d’opposition nouveau par lequel il est possible de s’opposer à un brevet délivré, à l’intérieur des 9 mois suivant sa délivrance. Il présente plusieurs ressemblances avec un litige en brevets, mais se produit à l’intérieur du bureau des brevets et demeure confiné aux questions de validité du brevet et est prévu pour être beaucoup plus court qu’un litige. Il est donc sensiblement moins dispendieux qu’un litige et a l’avantage d’être présidé par des juges ayant des connaissances poussées en matière de brevets.

Ce mécanisme demande un engagement de l’opposant, car il sera appelé à participer activement à la démarche. Ceci implique que son anonymat ne peut être préservé.

Par ce mécanisme, il est non seulement possible, mais critique, de soulever tous les arguments qu’il est possible de soulever pour attaquer la validité, et non seulement des documents publiés. On peut soulever des faits comme des preuves que l’invention avait été utilisée publiquement plus d’un an avant le dépôt de la demande de brevet par exemple.

Ce dernier aspect s’avère critique, car la loi prévoit qu’une fois ce mécanisme engagé, il ne sera plus possible pour l’opposant d’utiliser les mêmes arguments dans un autre recours. Par exemple, il ne pourra plus argumenter que le brevet n’est pas valide s’il est accusé de contrefaçon et devra se contenter d’insister sur le fait que ses activités ne correspondent pas à la définition donnée par les revendications pour se défendre.

Le court délai de 9 mois suivant la délivrance, combiné à l’obligation de présenter un dossier complet, risque d’être serré dans biens des cas. Il pourrait alors être préférable d’intenter le recours dans le circuit fédéral ou de considérer la révision inter partes.

Les taxes gouvernementales de base pour la procédure de révision post-délivrance sont de 35 800 $.

Révision inter partes

Ce mécanisme de révision est une version un peu métamorphosée du mécanisme qui existait auparavant sous le nom de réexamen inter partes. Cet ancien mécanisme disparaîtra graduellement à la faveur du nouveau, qui est disponible depuis le 16 septembre 2012.

Ce nouveau mécanisme de révision inter partes peut être engagé après l’écoulement de la période de 9 mois suivant la délivrance du brevet, prévue pour la révision post-délivrance.

La révision inter partes comporte des similitudes avec la révision post-délivrance, comme la durée et la renonciation implicite, mais ne peut être utilisée pour invoquer autre chose que des documents publiés à l’encontre de la nouveauté ou de l’inventivité des revendications du brevet. La révision inter partes se veut un substitut à des démarches en cour fédérale et il est donc impossible d’engager ce recours lorsque l’on a déjà intenté des démarches pour faire invalider le brevet.

L’expression latine inter partes fait référence à des démarches légales impliquant deux parties, et contrairement au cas du réexamen ex partes, l’opposant qui dépose la demande de révision inter partes sera appelé à intervenir activement durant les procédures.

La taxe gouvernementale de base pour intenter les procédures de révision inter partes est de 27 200 $.

Conclusion

Comme vous pouvez le voir, il peut être difficile de s’y retrouver dans tous ces mécanismes. N’hésitez donc pas à nous consulter, ou encore à vous référer au tableau récapitulatif au besoin!